

Je n’ai pratiquement pas connu mon père ; il est mort quand j’avais 5 ans. Il soignait les habitants du nord et rentrait souvent le soir avec des fruits, des légumes, des poules, des œufs…qu’il recevait en paiement de son travail. C’était un homme bon, cultivé et détaché des contingences matérielles. Il écrivait des poèmes et composait des musiques. Le soir, il organisait des séances de lecture en famille dans le but de sensibiliser ses enfants aux choses de l’art. Il était facétieux aussi, et ne manquait jamais une occasion de nous faire rire. Ses enfants l’aimaient beaucoup, et l’aiment encore aujourd’hui ; près d’un demi siècle après sa mort, il continue d’occuper une bonne part de nos discussions familiales…
Malheureusement, cette période lointaine reste floue dans ma mémoire ; l’image de mon père provient plus des récits de mes frères et soeurs que de mes propres souvenirs.

Une fière indolente aux charmes surannés,
Qui d'un clavecin frêle aux ivoires fanés
Joue de gais menuets ou d'ennuyeuses gammes.
Mes amis, notre ville est une belle femme
Qui pour un peu d'amour nous fera tous damner ;
Qui sait toujours nous prendre et souvent se donner,
Se refuse parfois mais jamais ne réclame !
Le doux rythme marin qui chante au Fonds Coré
Dit les serments qu'elle a tant de fois murmurés,
Et qu'emporte le vent qui souffle de Saint-James ;
Mais le même air jadis, enfants, nous a bercés,
Tari les premiers pleurs que nos yeux ont versés ;
Elle est amante et sœur, en un mot : elle est femme !
(Sonnet Hippolyte de Reynal)